Conclure un CDD de remplacement

Essentiel

Un CDD doit être établi par écrit et comporter un certain nombre de mentions obligatoires. Le CDD de remplacement ne doit pas être utilisé pour pallier un manque d’effectif.

Lorsqu’un salarié est absent de son poste de travail, l’employeur a la possibilité d’embaucher, sous contrat de travail à durée déterminée, un autre salarié pour le remplacer (C. trav. art. L 1242-2).

Toutes sortes d’absences peuvent donner lieu à remplacement. Il n’est pas nécessaire que le salarié soit absent dans le cadre d’un congé prévu expressément par le Code du travail (maladie, maternité, congés payés...). Il suffit qu’il soit physiquement absent de son poste habituel de travail. Le salarié remplacé peut néanmoins être toujours dans l’entreprise, mais temporairement déplacé sur un autre poste. Le seul motif d’absence pour lequel il est strictement interdit de recourir au CDD est le remplacement de salariés grévistes.

REMPLACEMENT PARTIEL

Les juges admettent la possibilité de recourir au CDD dans le cadre d’un remplacement partiel : l’article L 122-1-1, 1° du Code du travail qui autorise le recours au contrat à durée déterminée pour le remplacement d’un salarié absent n’exclut pas la possibilité d’un remplacement partiel. La faculté ainsi offerte à l’employeur de recruter un salarié sous CDD ne comporte pas pour lui l’obligation d’affecter celui-ci au poste occupé par le salarié absent. Il résulte des termes de l’article L 122-3-3, alinéa 2 du Code du travail que la rémunération du salarié sous CDD doit être identique à celle du salarié sous CDI qu’il remplace, dès lors qu’il est de qualification équivalente et qu’il occupe les mêmes fonctions (Cass. soc. 15 octobre 2002 n° 00-40.623).

Il n’est ainsi pas nécessaire que le salarié sous CDD accomplisse la totalité des tâches du salarié qu’il remplace. Il peut n’effectuer qu’une partie de ses tâches ou de ses responsabilités.

TÂCHE PRÉCISE ET TEMPORAIRE

Attention, le recours au CDD n’est légitime que s’il est conclu pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire (C. trav. art. L 1242-2). Recourir aux emplois précaires pour pour­voir un poste permanent de l’entreprise est illégal. L’article L 1242-1 du Code du travail dispose en effet qu’un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Ainsi, un employeur qui aurait recours de manière régulière à des CDD pour faire essentielle­ment face à des absences prévi­sibles et qui utiliserait ainsi ce type de contrat pour pallier un manque d’effectif serait condamné par les tribunaux.

Lorsqu’ils sont saisis de ce type de contentieux, les juges apprécient toujours la situation au cas par cas et les solutions peuvent par­fois être différentes.

En 2004, la Cour de cassation a ainsi jugé qu’il était possible de conclure des CDD de remplace­ment successifs avec le même salarié. Toutefois, le recours à des CDD successifs ne doit pas, conformément à l’article L 1242-1 du Code du travail, avoir pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Tel est le cas d’une société d’autoroute qui avait conclu avec un salarié, sur une période de 24 mois, 22 CDD au cours desquels le salarié avait effectué des tâches identiques avec la même qualification. Le renou­vellement systématique des contrats caractérisait ainsi un mode normal de gestion de la main-d’oeuvre (Cass. soc. 29 septembre 2004 n° 02-43.249).

Dans une autre affaire, un sala­rié avait été engagé, durant 16 mois consécutifs, selon 14 CDD afin de pourvoir au remplacement successif d’une dizaine de salariés absents pour raisons diverses. Les contrats concernaient le même emploi, avec la même qualification. Les juges ont pourtant consi­déré que « les contrats de travail avaient tous été établis pour faire face au remplacement de salariés qu’ils désignaient nom­mément et qui étaient effectivement absents pour maladie, maternité, congés payés ou congé parental d’éducation. Ces contrats, conclus chacun pour une durée bien délimitée, étaient autonomes les uns par rapport aux autres, et leur succession n’avaient pas eu pour effet de créer entre les parties une relation de travail à durée indéterminée » (Cass. soc. 16 septembr e 20 09 n° 08-40.187).

FORMALISME DU CONTRAT DE TRAVAIL

Un CDD doit donner lieu à un écrit, lequel doit comporter un certain nombre de mentions obligatoires.

Selon l’article L 1242-12 du Code du travail, le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. À défaut, i l est réputé conclu pour une durée indéterminée.

Ce formalisme est très impor­tant. Le contrat doit par ail­leurs être signé par les deux parties : employeur et salarié. Le défaut de signature, notam­ment du salarié (sauf mauvaise foi ou intention frauduleuse de sa part), entraîne la requalifica­tion du CDD en CDI.

MOTIF

Le contrat doit comporter la définition précise de son motif. S’il s’agit d’un remplacement, le contrat de travail devra le mentionner. Attention, il ne peut y avoir qu’un seul motif par contrat. Ainsi dans le cadre d’un remplacement, il ne peut s’agir que du remplacement d’un seul salarié. Mentionner le remplacement de plusieurs salariés sur un seul contrat est illégal. Les juges sont actuelle­ment très stricts sur ce point : il ne peut être conclu qu’un CDD p our l e r emplacement d’un seul salarié en cas d’ab­sence, à défaut, le contrat est requalifié en CDI (Cass. soc. 28 juin 2006 n° 04-40.455).

Remplacer « en bloc » plusieurs salariés dans le cadre d’un même CDD entraîne une requalification en CDI (Cass. soc. 16 décembre 2010 n° 09-41.627). « Le contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour le remplacement d’un seul salarié en cas d’absence ; il ne peut donc être conclu pour le remplacement de plusieurs salariés absents, que ce soit simultanément ou successive­ment » (Cass. soc. 18 janvier 2012 n° 10-16.926).

À défaut de respecter ces règles, le CDD est réputé être un CDI, c’est-à-dire qu’aucune preuve q ue l a commune volonté des parties était bien de signer un CDD ne pourra être admise.

PERSONNE REMPLACÉE

Le contrat doit comporter des mentions obligatoires mentionnées à l’article L 1242-12 du Code du travail, notam­ment le nom et la qualification professionnelle de la personne remplacée lorsqu’il s’agit d’un CDD de remplacement. S’il manque l’une ou l’autre de ces deux mentions, le contrat est réputé conclu pour une durée indéterminée. Les juges l’ont encore récemment rappelé dans un arrêt du 31 octobre dernier (Cass. soc. 31 octobre 2012 n° 11-21.714).

TERME ET DURÉE

Le CDD doit comporter la date de son terme s’il est conclu de date à date. Les CDD de rempla­cement peuvent ne pas compor­ter de terme précis, c’est-à-dire de date de fin de contrat. Ils doivent néanmoins comporter une disposition précisant de façon claire et précise quel sera l’événement qui mettra fin au contrat. La rédaction de cette clause est libre mais attention à sa précision car elle condition­nera la fin du contrat. S’il est indiqué que le contrat prendra fin au retour du salarié rem­placé, le CDD se poursuivra tant que l’intéressé n’aura pas repris son poste (ex : salariée absente pour maladie, puis congé de maternité suivi d’un congé parental de 3 ans). Si le terme du contrat est lié à la fin d’un congé de maternité à l’ex­clusion de tout autre motif d’ab­sence, le CDD prendra fin à cette date même si la salariée remplacée prolonge son absence par un congé parental.

Un CDD sans terme précis doit obligatoirement comporter une durée minimale. Cette durée, non fixée par la loi, est laissée au libre choix des parties. Le contrat ne peut être rompu avant la fin de cette durée mini­male, même si l’événement y mettant fin se produit avant. Ainsi, si la période minimale fixée est d’un mois, le salarié sous CDD devra rester dans l’entreprise jusqu’à la fin de cette période, même si le sala­rié remplacé revient avant.

Ces mentions sont indispen­sables à la validité du CDD.

Par ailleurs, le contrat doit com­porter la désignation du poste de travail, l’intitulé de la conven­tion collective applicable (s’il y en a une), la durée de la période d’essai éventuellement prévue (l’absence de mention vaut absence de période d’essai), le montant de la rémunération et de ses différentes composantes et le nom et l’adresse de la caisse de retraite complémen­taire ainsi que, le cas échéant, ceux de l’organisme de pré­voyance (mais l’absence de ces mentions ne constitue qu’une simple irrégularité).

Pour aller plus loin

SIGNATURE DU CONTRAT

Le contrat doit être transmis au salarié, au plus tard, dans les deux jours ouvrables suivant l’embauche. Un CDD non signé par le salarié sera requalifié en CDI, sauf si ce dernier a délibérément refusé de le signer de mauvaise foi ou dans une intention frauduleuse. Toutefois, la mauvaise foi n’a pas été retenue dans une affaire où le salarié n’avait pas répondu aux relances de son employeur pour signer son contrat.

UNE PÉRIODE D’ESSAI SPÉCIFIQUE

Le CDD peut comporter une période d’essai : « Sauf si des usages ou des stipulations conventionnelles prévoient des durées moindres, cette période d’essai ne peut excéder une durée calculée à raison d’un jour par semaine, dans la limite de deux semaines lorsque la durée initialement prévue au contrat est au plus égale à six mois et d’un mois dans les autres cas. Lorsque le contrat ne comporte pas de terme précis, la période d’essai est calculée par rapport à la durée minimale du contrat » (C. trav. art. L 1242-10). Attention ! le décompte s’effectue en jours calendaires.

TERME DU CDD : UNE PROCÉDURE À SUIVRE ?

Le contrat de travail à durée déterminée cesse de plein droit à l’échéance du terme (C. trav. art. L 1243-5). Il n’y a pas de procédure particulière à suivre (courrier, préavis, etc.), sauf si la convention collective en dispose autrement. Attention toutefois, si le salarié est titulaire d’un mandat de représentation du personnel, la cessation du lien contractuel ne peut se faire qu’après constatation par l’inspecteur du travail que le salarié n’a pas fait l’objet d’une mesure discriminatoire.

SUSPENSION DU CONTRAT DE TRAVAIL

La suspension du contrat de travail à durée déterminée ne fait pas obstacle à l’échéance du terme (C. trav. art. L 1243-6). Ainsi, le fait que le salarié soit malade ou en congé de maternité n’a aucune incidence.

Il en est de même pour le salarié dont le contrat de travail est suspendu pour accident du travail : les périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle ne font pas obstacle à l’échéance du contrat de travail à durée déterminée (C. trav. art. L 1226-19).

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